Guérison de la femme courbée. 27ème dimanche après la Pentecôte.

Au nom du Père, du Fils et du Saint Esprit.

La guérison par le Christ Sauveur, un samedi, d’une femme qui était depuis dix-huit ans courbée par la maladie, est l’un des nombreux exemples de guérisons semblables le jour du sabbat, c'est-à-dire le jour où, selon la loi israélite, l’homme ne devait accomplir aucune tâche. On devait se reposer. Ce repos avait été instauré en symbole du septième jour, où le Seigneur, ayant créé le monde, s’était reposé de son œuvre.

Ce jour de sabbat, ce septième jour, était un jour durant lequel l’homme devait se reposer. Non seulement se détourner des travaux qui lui apportaient du profit ou bien étaient totalement tournées vers la terre, mais aussi rassembler de nouvelles forces de vie. La terre aussi était concernée : la septième année était une année de repos de la terre. Le champ qui avait été cultivé durant six ans n’était pas labouré la septième année. On le laissait reposer et ce n’est qu’à la huitième année - c'est-à-dire, la première année d’un nouveau cycle de sept ans - qu’on le labourait. Là aussi, le cœur de cette loi consistait en ce que cette année là les forces de vie se renouvelaient, permettant une nouvelle éclosion.

Les exceptions au repos du septième jour, que nous lisons dans l’Ancien Testament, exceptions que rappelle le Sauveur, ont aussi cet objectif : le jour du sabbat, on pouvait détacher son âne, son bœuf, mener boire son bétail parce que c’était une journée durant laquelle la vie devait triompher de l’effort. Ce n’était pas un repos vain mais le renouvellement des forces de vie. Et le Christ accomplit souvent des miracles ce septième jour, comme pour confirmer que le septième jour, la vie, la plénitude doivent revenir. Doit revenir la force de tous ceux qui l’ont dépensée, de tous ceux en qui elle commençait à s’éteindre.

Pourtant, il y a aussi une autre signification, me semble-t-il, à ce miracle du Christ le jour du sabbat. Quand Dieu s’est reposé de Ses œuvres, Il n’a pas abandonné la terre et le cosmos qu’Il avait créés. Il a continué à les entourer de son attention et de son amour. Toutefois, Il a confié le soin concret de la terre à l’homme, qui « appartient » à deux mondes. D’un côté, il est de la terre, il appartient à toute la série des êtres vivants créés par Dieu. De l’autre côté, il appartient au monde spirituel : non seulement il est créé à l’image et à la ressemblance de Dieu, mais en lui vit l’esprit qui fait de lui un familier de Dieu. La vocation de l’homme était, comme l’a dit saint Maxime le Confesseur, de réunir la terre et le ciel, puisqu’il était à la fois citoyen du Royaume de l’Esprit et citoyen de la terre. Ainsi, la terre serait pénétrée de la présence divine, pénétrée de l’esprit de la vie. Le septième jour c’est toute l’Histoire. L’Histoire à la tête de laquelle devait se tenir l’homme accompagnant le monde entier vers le Royaume divin.

Mais l’homme n’a pas accompli sa vocation : il a trompé Dieu, la terre et son prochain. Il a placé la terre sous le pouvoir des forces des ténèbres. Il a accompli une trahison. La terre, son destin historique et le destin personnel de l’homme étaient sous le pouvoir des forces du mal. Et quand le Christ est né, le seul sans péché, le seul homme authentique et véritable, Il est devenu le centre de l’histoire, la tête du monde créé, son guide. C’est pourquoi Il accomplit autant de miracles le jour du sabbat, le jour qui est un symbole pour toute l’histoire de l’humanité. Par ces miracles, Il manifeste que l’ordre de l’histoire authentique est restauré en Lui, et qu’il est renouvelé par Lui partout où l’homme se détournera du mal, cessera d’être un traître et entrera dans le travail divin de recréation du monde terrestre en monde céleste. Amen.

Mgr Antoine (Bloom) de Souroge

13 décembre 1981

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