Après le Chant des Chérubins. 2e partie

4) Le sacrifice dans les deux Alliances

Puisque le sacrifice du Nouveau Testament est comparé et même opposé aux sacrifices de l’Ancien, attardons-nous plus attentivement à ces derniers.

« L’autel des holocaustes mesurait 30 coudées de largeur sur 15 de hauteur. Un feu éternel y brûlait. Ce n’était pas un foyer mais un véritable incendie. Représentez-vous le craquement, le sifflement, le grésillement du feu sur cet autel, imaginez l’espèce de cyclone planant au-dessus du temple. Selon la tradition, même la pluie ne parvenait jamais à l’éteindre (...) On y brûlait des bœufs entiers, sans parler d’une multitude de boucs, de béliers, etc. Imaginez quelle devait être l’odeur de brûlé et de graisse, si la fumée d’un simple chachlik oriental se sent à plusieurs rues de distance ! Selon Joseph Flavius, on immolait 265 000 agneaux pour les fêtes pascales (...) Les prêtres avaient parfois du sang jusqu’à la cheville, l’immense parvis était tout entier couvert de sang, les natures nerveuses devaient s’abstenir d’y monter. 13 taureaux étaient immolés le jour de la fête des tabernacles. Volens, nolens, l’ampleur du culte vétérostamentaire effrayait »[10]

Selon le rite de Moïse, le prêtre oint et asperge de sang. Le prêtre orthodoxe asperge d’eau. L’ampleur quantitative du culte vétérotestamentaire tient désormais toute entière dans la tension qualitative du culte du Nouveau Testament. A la puissance extérieure, à la frénésie du culte antique fait place l’élévation d’un morceau de pain et d’une coupe de vin. Dans la communion, nous sommes en présence d’une substance à la densité maximale, impensable dans le monde physique ordinaire : un petit morceau de pain contient tout entier Celui qui est plus que tout l’univers.

Au zénith de l’Ancien Testament, Dieu commence à déshabituer les hommes de la pratique des sacrifices rituels : « J’allai jusqu’à leur donner des lois qui n’étaient pas bonnes et des coutumes dont ils ne pouvaient pas vivre », dit Dieu à Ezéchiel (Ez 20, 25). Seuls les dix commandements étaient bons ; la loi rituelle n’est donnée qu’après la fabrication du veau d’or, comme un remède homéopathique : un peu de poison sous contrôle médical pour que l’homme, habitué aux rituels païens sanguinaires, ne retombe pas dans son suicide spirituel.

« Ce qui est agréable à Dieu, c’est un esprit brisé », est-il révélé au Psalmiste. Amos s’entend dire : « Je hais, je méprise vos fêtes et je ne peux sentir vos réunions solennelles. Quand vous m’offrez des holocaustes, vos oblations, je ne les agrée pas, le sacrifice de vos bêtes grasses, je ne le regarde pas » (Am 5, 21-22). Le livre de Jérémie retranscrit la même révélation : « Vos holocautes ne me plaisent pas, vos sacrifices ne m’agréent pas » (Jer 6, 20). Et Isaïe transmet à son peuple : « Que m’importent vos innombrables sacrifices, dit le Seigneur. Je suis rassasié des holocaustes de béliers (...), au sang des taureaux, des agneaux et des boucs je ne prends pas plaisir (...) N’apportez plus d’oblation vaine (...), néoménie, sabbat, assemblée, je ne supporte pas fausseté et solennité. Vos néoménies, vos réunions, mon âme les hait ; elles me sont un fardeau que je suis las de porter. Quand vous étendez les mains, je détourne les yeux (...) Vos mains sont pleines de sang. Lavez-vous et purifiez-vous. Otez de ma vie vos actions perverses ! Cessez de faire le mal, apprenez à faire le bien ! Recherchez le droit, redressez le violent ! Faites droit à l’orphelin, plaidez pour la veuve » (Is 1, 11-17)[11].

Vient enfin le temps du Nouveau Testament. Si l’on apportait jadis à Dieu des troupeaux de taureaux et de béliers, c’est désormais Dieu Lui-même qui vient à l’humanité avec Sa Victime, Son offrande. Les efforts humains pour se hisser jusqu’à Dieu, la bonne volonté des hommes prêts à répandre le sang pour que son ruissellement soit un cri de la terre vers le ciel se sont révélés vains : « La loi n’a rien amené à sa perfection » (Heb 7, 19). Les victimes de l’Ancien Testament ne peuvent « rendre parfait l’adorateur en sa conscience » (Heb 9, 9).

Ces égarements du sentiment religieux contiennent néanmoins une intuition de vérité. Car « sans effusion de sang, il n’y a point de rémission » (Heb 9, 22). Le sang, c’est la vie et l’homme a soif de confier, de consacrer sa vie, « toute notre vie », à un monde supérieur. Dieu ne demande-t-il pas aux hommes : « Fils, donne-moi ton cœur » ? L’offrande d’un sacrifice témoigne du mouvement d’une conscience inquiète, d’un remords rongeant sourdement l’âme, du sentiment de l’anormalité de sa vie. Après le sacrifice, pourtant, rien ne change. Le sacrifice reste un rituel purificateur sans repentir, sans conversion, sans abandon des péchés. C’est pourquoi on était amené à apporter des offrandes toujours nouvelles, c’est pourquoi les offrandes étaient quotidiennes. Les cadavres des animaux ne pouvaient combler l’abîme séparant l’homme de Dieu.

Puis vint le Christ, l’agneau de Dieu qui enlève les péchés du monde. Le Christ n’a pas pris la responsabilité juridique ou morale des péchés des hommes devant la face du Père. Il a assumé les conséquences de nos péchés. Le Christ a comblé de Sa présence l’auréole de mort dont les hommes s’entouraient, s’isolant de Dieu. Sans cesser d’être Dieu, il est devenu homme. Les hommes s’étaient écartés de Dieu, s’éloignant involontairement vers le néant, et c’est vers cette frontière du néant que le Christ s’avance librement, sans prendre le péché, mais en assumant les conséquences du péché, de même qu’un pompier qui se jette dans le feu n’a pas part à la faute de l’incendiaire, mais prend sur lui la douleur de ceux qui demeurent dans le bâtiment enflammé.

Le Christ n’a pas trouvé tous les hommes sur la terre. Beaucoup étaient déjà descendus dans le schéol, dans la mort. Alors le Pasteur suit Ses brebis perdues, jusque dans le schéol, afin que même là-bas, même après la mort, l’homme puisse trouver Dieu. Le Christ verse Son sang non pas pour apaiser la colère du Père et Lui donner le droit juridique « d’amnistier » les hommes. En versant Son sang, l’amour à la recherche de l’homme peut descendre dans le royaume de la mort. Le Christ ne fait pas irruption dans l’enfer comme un Deus ex machina[12], Il entre dans la capitale de Son ennemi le plus naturellement du monde, en mourant Lui-même. Le Christ ne connaît pas une mort atroce sur la croix pour offrir un sacrifice à Dieu ou au diable : « Il a étendu les mains sur la croix pour embrasser tout l’univers » (Saint Cyrille de Jérusalem. Catéchèses, 13, 28).

Le sacrifice du Christ, c’est le don de Son amour à nous, les hommes. Il s’offre à nous, Il nous offre Sa vie, la plénitude de Son éternité. Nous ne pouvions pas présenter à Dieu l’offrande qui Lui était due. Dieu vient à notre rencontre et s’offre à nous. L’offrande due à Dieu est celle qui permet à la plénitude de notre conscience d’être avec Dieu. Nous sommes inconstants, c’est pourquoi nous laissons retomber nos élans de sentiment religieux, de repentir ou de reconnaissance pour revenir au service de la chair. Mais le Christ « est le même hier et aujourd’hui et à jamais » (Heb 13, 8). C’est pourquoi Il n’est pas « dans la nécessité, comme les grands-prêtres, d’offrir des victimes d’abord pour ses propres péchés, ensuite pour ceux du peuple, car cela Il l’a fait une fois pour toutes en s’offrant Lui-même » (Heb 7, 27).

5) Un sacrement

C’est précisément parce que Dieu s’offre à nous dans la communion que la communion est un sacrement. Ce n’est pas nous qui l’accomplissons, c’est pourquoi nous ne sommes pas en état de le comprendre. L’Écriture appelle le Christ pierre et roc. Le roc est une pierre non taillée par l’homme. Il est un support naturel, comme le prévoyait déjà la loi de l’Ancien Testament et en témoignent les évènements de l’histoire sainte. Le sacrement de la communion lui ressemble en ce qu’il ne doit rien à l’homme, de même que selon la Bible on n’utilisait aucun outil pour élever un autel : « Ce qui est consacré à Dieu doit être naturel »[13].

Les paroles du moment culminant de la Liturgie – Ce qui est à Toi, le tenant de Toi, nous Te l’offrons – sont tirées de la prière de David sur les matériaux destinés à la construction du temple : « Tout est à Toi et les Tiens Te l’offrent » Car la Liturgie est édification du temple du corps du Seigneur.

La communion est un mystère non pas parce qu’elle relève du secret, mais parce qu’elle est incompréhensible. D’autre part, comme le remarquait très justement Vladimir Zelinsky, « dans le christianisme, ce n’est pas le mystère qui est premier, mais l’annonce »[14]. Dans Col 1, 27-28, l’apôtre Paul affirme : « Dieu a bien voulu leur faire connaître de quelle gloire est riche ce mystère chez les païens : c’est le Christ parmi vous ! l’espérance de la gloire ! Ce Christ, nous l’annonçons, avertissant tout homme et instruisant tout homme en toute sagesse, afin de rendre tout homme parfait dans le Christ ». Quel rapprochement intéressant : un mystère, dont on instruit tout homme. En Rom. 15, 16, Paul dit être « un officiant du Christ Jésus auprès des païens ». Prêcher le Christ est également un ministère sacré. Et si dans les mystères antiques l’initié devait se protéger du monde extérieur par la contemplation intérieure, dans le christianisme, au contraire, le mystère est révélé au monde dans l’annonce de l’Évangile. Dans le christianisme, ce n’est pas ce qui est caché, mais ce qui est révélé qui est ésotérique, mystique : le Verbe s’est fait chair.

6) L’Eucharistie dans l’Ecriture

Emportés par le feu de la polémique, certains prédicateurs protestants affirment parfois que la vie chrétienne n’a pas toujours gravité autour de l’Eucharistie, qu’il s’agit d’une invention tardive de l’Église orthodoxe dépourvue de fondement scripturaire. Je me permets de citer ici quelques textes de l’Écriture qui leur sont indubitablement familiers, avec le minimum de commentaires.

Voici par exemple ce que dit saint Paul : « Ce n’est pas un aliment, certes, qui nous rapprochera de Dieu. Si nous n’en mangeons pas, nous n’avons rien de moins ; et si nous en mangeons nous n’avons rien de plus » (I Cor 8, 8). Comparez ces mots avec ce qui suit sur la Communion : « Le pain que nous rompons n’est-il pas communion au corps du Christ ? » (I Cor 10, 16). En d’autres termes, l’apôtre Paul distingue clairement le pain ordinaire du pain de l’Eucharistie. Si le premier ne peut rapprocher du Christ, le second nous unit directement à Lui. Cette distinction entre les deux pains remonte à l’Évangile : « Travaillez, non pour la nourriture qui se perd, mais pour la nourriture qui demeure en vie éternelle, celle que vous donnera le Fils de l’homme. » « Le pain de Dieu c’est celui qui descend du ciel et donne la vie au monde. » « Je suis le pain de vie. » « Car ma chair est vraiment une nourriture et mon sang vraiment une boisson. Qui mange ma chair et boit mon sang demeure en moi et moi en lui (...) Celui qui me mange lui aussi vivra par moi. » « Cela vous scandalise ? » (Jn 6, 27, 33, 48, 55-58, 61).

Le même verset de l’apôtre témoigne bien de sa compréhension de l’Eucharistie : « La coupe de bénédiction que nous bénissons, n’est-elle pas communion au sang du Christ ? » (I Cor 10, 16). Il s’agit bien de communion réelle au Christ et non d’un simple mémorial. « Que chacun donc s’éprouve soi-même, et qu’ainsi il mange de ce pain et boive de cette coupe ; car celui qui mange et boit, mange et boit sa propre condamnation, s’il ne discerne le Corps. Voilà pourquoi il y a parmi vous beaucoup de malades et d’infirmes et que bon nombre sont morts » (I Cor 11, 28-30)[15].

« Je ne veux pas que vous entriez en communion avec des démons. Vous ne pouvez boire la coupe du Seigneur et la coupe des démons ; vous ne pouvez participer à la table du Seigneur et à la table des démons. » (I Cor 10, 20-21). Si la participation à un rite satanique ne se réduit pas à une innocente commémoration du monde des esprits, mais est une expérience réelle de communion avec les démons, combien plus la participation à la Cène du Seigneur est-elle communion véritable avec le Seigneur et non simple commémoration d’un épisode de l’Évangile. L’apôtre Paul se distingue ainsi des païens contemporains en prenant leurs mystères plus au sérieux qu’ils ne le font eux-mêmes. Dans ce qui n’est, pour les païens cultivés, qu’une allégorie, l’apôtre voit une réalité, une sombre mystique. Mais s’il discerne une force véritable même dans les mystères païens, quelle puissance, échappant aux philosophies, aux allégories et aux mémoriaux ne voit-il pas dans le sacrement du Christ !

Lorsque le Christ dit « Qui mange ma chair et boit mon sang demeure en Moi » (Jn 6, 56), beaucoup se scandalisent et s’éloignent. Mais le Christ ne s’est pas empressé d’exhorter ceux qui se détournaient ainsi, comme s’il fallait comprendre Ses paroles au niveau symbolique et non au sens propre. Non, Il se retourne vers Ses disciples et leur demande brutalement « Voulez-vous partir, vous aussi ? »

L’expression « manger la chair » est effectivement employée au sens figuré dans les Saintes Écritures. Mais elle désigne dans ce cas une offense, une malédiction. Voir Ps 26, 2 ; Job 19, 22 ; Mich 3, 3 ; Gal 5, 15. L’Écriture ne lui donne pas d’autres sens. Par conséquent, si l’on veut entendre la promesse du Christ sur le sacrement de l’Eucharistie au sens figuré, on aura alors : Celui qui mange ma chair, c’est-à-dire celui qui me calomnie, aura la vie éternelle[16].

L’Eucharistie a lieu la nuit où le Christ ne parle plus en paraboles à Ses disciples, leur expliquant tout clairement. Il est exclu, dans ce contexte, qu’il ait eu recours à l’allégorie (Jn 16, 29). Avant de mourir, le Christ parle clairement et sans équivoque. On ne saurait voir dans Ses paroles sur Son corps et Son sang une indication allégorique de la valeur salvifique de Sa doctrine : dès le début de Son discours public sur le Pain de vie, en effet, le Christ parlait au futur : « Le pain que je vous donnerai ». S’il s’était agi de la prédication, de la doctrine du Christ, le présent aurait été plus adapté.

Rappelons à nouveau le parallélisme entre les deux Pâques. Le Christ reprend les mots de Moïse : « Voici le sang de l’alliance que le Seigneur a conclue avec vous » (Ex 24, 8). Mais Moïse utilisait alors le sang d’un agneau. Le Christ reprend les mêmes mots, remplaçant l’agneau vétérotestamentaire par Sa propre personne. Et le sang de l’agneau ne serait-il que du vin ?

Comme le dit saint Philarète de Moscou, « Le Seigneur n’a pas institué le Sacrement ni donné Son corps et Son sang pour que nous sachions que c’est un corps et du sang, mais pour que nous y communions »[17].

7) Le sujet du sacrement

Qui, pour reprendre la terminologie des manuels de théologie du siècle passé, est « le sujet du sacrement » ? Qui célèbre le sacrement ? La tradition catholique, de même que la plupart de nos paroissiens de base supposent que c’est le prêtre qui accomplit le sacrement, ayant reçu de par son ordination, les pleins-pouvoirs de la hiérarchie ecclésiastique. Je ne discuterai pas de cette opinion, me contentant de remarquer que la Tradition de l’Église admet une toute autre réponse à cette question.

Saint Jean Chrysostome rappelle que la plus grande récompense du patriarche Joseph, dans l’Ancien Testament, était le droit de lever la coupe en l’honneur du roi. Dans le sacrement du Nouveau Testament, c’est le contraire : le Roi donne Lui-même la coupe[18]. « Le prêtre ne fait que Le représenter et prononcer la prière, c'est la grâce et la puissance de Dieu qui opèrent. »[19] Ainsi le prêtre ne fait-il que redire la parole qui opère en nous le sacrement. « Non, ce n'est pas un homme qui convertit les offrandes au corps et au sang de Jésus-Christ. Ceci est mon corps, a dit le Sauveur. C'est cette parole qui transforme les offrandes. Et comme cette parole plus ancienne: Croissez, multipliez-vous et remplissez la terre, n'était qu'une parole, mais a produit un grand effet en donnant à la nature humaine la vertu de procréer des enfants; de même cette parole plus nouvelle : Ceci est mon corps, ne cesse d'enrichir de la grâce ceux qui participent dignement à la table sainte. »[20]

Le Sacrement est opéré par le Christ et l’Esprit Saint. Le prêtre est le serviteur du sacrement, d’où son nom de ministre du culte.

Dans la Liturgie, le Christ se découvre comme « Celui qui offre et qui est offert, qui reçoit et qui est distribué ». Ce passage de la prière eucharistique de saint Jean Chrystostome montre bien que le Christ est Celui qui offre l’unique sacrifice, c’est-à-dire le sacrificateur ; Il est en même temps Celui qui est offert en sacrifice, c’est-à-dire l’agneau ; Il est également Celui qui reçoit le sacrifice et Celui qui est offert aux communiants en nourriture. La volonté humaine du Christ offre un sacrifice à Dieu (« Celui qui offre »). Et c’est à elle même qu’elle offre ce sacrifice : « Non pas ma volonté, mais la Tienne » (« qui est offert »). La volonté divine du Christ qui est l’unique volonté de toute la Trinité reçoit ce sacrifice (« celui qui reçoit »). Et selon l’accord commun des deux volontés la chair du Christ est distribuée aux communiants (« celui qui est distribué »).

Diacre André KOURAEV


Après le Chant des Chérubins. 1e partie

Après le Chant des Chérubins. 3e partie

[10] Paul FLORENSKY, Iz bogoslovkogo nasledia [De l’héritage théologique], p. 97-98.

[11] Ce passage de l’Ancien Testament exprime moins un rejet des sacrifices d’animaux, ordonnés d’une façon ou d’une autre par Dieu même. C’est pour se conformer à ces commandements que la Très-Sainte Mère de Dieu et saint Joseph apportèrent au temple deux colombes en l’honneur de la naissance d’un premier-né, Jésus. Il s’agit plutôt ici d’une remontrance portant sur le fait que les sacrifices, si grandioses soient-ils, ne rachètent pas l’iniquité, ne remplacent pas la justice.

[12] Deus ex machina, terme de la tragédie antique, dans laquelle le happy end était assurée par l’intervention d’une divinité. Dans le théâtre antique, l’acteur tenant ce rôle était descendu par le haut sur la scène au moyen d’un mécanisme.

[13] Cf. Saint Grégoire le Théologien. Discours 18. In : Tvorenia [Œuvres], t. 1. Troïtse-Serguieva Lavra, 1994, p. 226.

[14] Vladimir ZELINSKY. Mesto obitania Tvoego [Le lieu de Ta demeure]. In : Vybor [Choix], n°1, Moscou, 1987, p. 18.

[15] « Que l’homme s’éprouve lorsqu’il mange du pain du Seigneur ». Si le mot « mémorial » devait être entendu dans le sens d’une représentation abstraite de quelque chose d’existant ou ayant existé, ces paroles seraient inutiles ». In : Ouspensky, N. Anafora, p. 52.

[16] Cet argument très fort est employé par le métropolite Macaire Boulgakov dans sa Théologie dogmatique orthodoxe (Pravoslavno-dogmatitcheskoe bogoslovie, t.2. Saint-Pétersbourg, 1857, p. 296.)

[17] Pisma moskovskogo metropolitena Filareta k pokoïnomou arkhiepiskopou Aleksiou 1843-1867 [Lettres du métropolite de Moscou Philarète au défunt archevêque Alexis. 1843-1867]. Moscou, 1883, p. 52.

[18] Cf. Jean Chrysostome. Catéchèses, 1.

[19] Saint Jean Chrysostome. Sur la trahison de Judas, 2, 6.

[20] Ibid. Selon ce texte, le sacrement s’accomplit donc aux paroles « prenez et mangez » et non pas à l’épiclèse. Arrêtons-nous un instant à ceci, dans la mesure où passe ici encore une ligne de démarcation entre théologie orthodoxe et théologie catholique. La théologie catholique suppose que le sacrement s’accomplit et que le pain et le vin devienne corps et sang de Jésus-Christ lorsque le prêtre prononce « Prenez et mangez, ceci est mon corps », tandis que la tradition orthodoxe place le moment culminant un peu après, à la prière de l’épiclèse, qui appelle l’Esprit sur les dons. Ce texte de saint Jean Chrysostome semble parler en faveur de la tradition occidentale, mais remarquons que Chrysostome attire l’attention sur le fait que le sacrement s’accomplit parce que ces mots ont été un jour prononcés par le Christ et non parce que le prêtre les redit.

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